Gustave Bloch (1848-1923), un historien à Marlotte

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Au milieu de la petite colonie universitaire installée à Marlotte, se détache une figure importante qui a été éclipsée dans l’histoire par la notoriété de son fils : Gustave Bloch. En 1919, la retraite venue, il avait suivi son ami Gustave Lanson, directeur de l’École normale supérieure, dans ce petit village de la lisière sud de la forêt de Fontainebleau. Mais qui était Gustave Bloch ?

Une carrière universitaire exemplaire

Fils d’un instituteur devenu directeur de l’école israélite de Strasbourg, Gustave Bloch est né à Fegersheim le 21 juillet 1848. Il entre à l’École normale en 1868 (major !) mais ses études sont interrompues par la guerre de 1870. Il s’engage alors pour défendre la ville de Strasbourg et, dans la foulée, opte à Paris pour la nationalité française (1872). Reçu premier à l’agrégation de lettres en 1873, il enseigne au lycée de Besançon avant de partir pour Rome, intégrant la nouvelle promotion de l’École française. En 1876, il est chargé d’un cours d’antiquités grecques et romaines à la Faculté des Lettres de Lyon. C’est dans la capitale des Gaules qu’il se marie en 1878 avec Sarah Ebstein et que ses fils, Marc et Louis, sont nés. Carole Fink, dans Marc Bloch, une vie au service de l’histoire (1997), rappelle que Gustave Bloch est alors « un conférencier populaire et respecté qui reçoit les plus hautes évaluations pour son enseignement.» Il quitte Lyon en 1888 pour enseigner à l’École normale puis, après la réforme universitaire de Lavisse, est transféré à la Sorbonne (1904) où il enseigne jusqu’à sa retraite en 1920. Consécration, il est nommé au grade de chevalier de la Légion d’honneur en 1897 puis promu officier 1903.

Un grand historien du monde romain

L’œuvre de Gustave Bloch est consacrée presque entièrement à l’antiquité romaine. Selon les spécialistes de l’époque, ses écrits les plus importants sont sa thèse sur les Origines du Sénat romain (1883) et le tome 1 de l’Histoire de France publiée sous la direction de Lavisse (Gaule celtique et romaine, 1900). Mais son étude sur L’empire romain. Évolution et décadence (Flammarion, 1922) avait reçu également un très bon accueil des spécialistes : « elle nous donne en trois cents pages un résumé clair et substantiel, dont la lecture est aussi facile que fructueuse. Tous ceux qui ont suivi les leçons de M.Bloch y retrouveront les mérites de l’enseignement dont ils ont jadis bénéficié…» (A. Merlin, Journal des savants, novembre-décembre 1922, pp. 271). Gustave Bloch était également réputé pour ses articles publiés dans des recueils et mélanges ainsi que dans différentes revues d’histoire (Revue historique, Revue des études anciennes). Son dernier ouvrage, à peine esquissé avant sa mort, fut terminé par Jérôme Carcopino:  La République romaine de 146 à 44 avant Jésus-Christ, et publié dans l’Histoire générale de G. Glotz (1929).

La retraite à Marlotte…

Photo de la maison de Marlotte.

C’est dans la maison du Puits Carré, 2 rue Murger, à l’angle des actuelles rue Armand Charnay et rue Henry Murger, que Gustave Bloch s’installe avec son épouse, à la fin de la Première Guerre mondiale. Il y travaille à différents projets, se promène avec sa femme dans la forêt, fréquente assidûment ses amis universitaires Lanson et Fougères, et reçoit sa famille. Mais, comme Gustave Lanson, il est durement marqué par la mort d’un fils : Louis, pédiatre à l’hôpital des Enfants malades, est emporté par un cancer le 16 mars 1922. Ses élèves et continuateurs résument ainsi l’activité de sa retraite, dans la préface du dernier livre qu’il ne put qu’à peine esquisser : « Gustave Bloch s’était mis à la tâche dans sa studieuse retraite de Marlotte, avec une joyeuse ardeur. Quand il fut surpris par la mort (en décembre 1923).»

Gustave, son épouse, Marc et peut-être Mme Lanson.

Gustave Bloch sera inhumé au cimetière de Montparnasse le 5 décembre 1923. Son épouse continuera de séjourner à Marlotte où elle recevra régulièrement son fils Marc, le grand historien fondateur de l’École des Annales avec Lucien Febvre, qui sera fusillé par les Allemands en 1944.

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