Par le passé, le médecin a toujours joué un rôle important dans un village, et Bourron-Marlotte ne faisait pas exception. C’est pourquoi plusieurs docteurs sont restés associés à l’histoire de notre village, tels Charles Durand1, Henri Dalmon2 ou Paul Roesch3. D’autres n’ont cependant pas encore fait l’objet de recherches approfondies. Dans cet article, nous donnerons quelques éléments d’information sur l’un d’eux : Jean Abdon Fauché.4
C’est au hasard de la restauration de tombes de personnalités du cimetière de Bourron-Marlotte que nous nous sommes intéressés à l’identification d’un fragment de monument portant le nom de FAUCHÉ et, après de longues recherches, nous avons découvert qu’il s’agissait d’un membre de la famille d’un docteur du village.
Parcours professionnel tortueux et nombreuses naissances
Jean Abdon Fauché est né à Eymet, en Dordogne, le 5 avril 1820, d’un père marchand drapier et d’une mère institutrice. Il suit des études de médecine et commence à exercer au Châtelet-en-Brie (Seine-et-Marne), où il se marie avec Nathalie Eugénie Plicque en 1845. Le couple y aura trois filles. Désireux de s’impliquer davantage dans la vie du village, Jean Fauché rejoint le conseil communal, puis est élu maire.
Sans que nous n’ayons pu en identifier la cause, son mandat est toutefois de courte durée et la famille Fauché déménage vers Coupvray, un autre village du nord de la Seine-et-Marne, où naît leur quatrième fille. Puis, un an plus tard, c’est à Louviers (Eure) que le docteur décide d’exercer pendant les quatre à cinq années suivantes. Cette période voit la naissance de trois enfants additionnels.
Il est possible que le parcours professionnel de Jean Fauché soit ensuite passé par Paris, puisqu’on relève la naissance d’une autre fille (le huitième enfant !) à La Villette en 1856.
Stabilisation à Bourron et naissance du quinzième enfant
Quelques années plus tard, le médecin et sa famille se dirigent vers Bourron, et c’est le 15 juin 1860 que Jean Abdon Fauché y achète une maison, dans le secteur du Pavé du Roy et de la rue de la Joie (actuelle rue Burat), qui restera dans la famille jusqu’en 1886. Les archives cadastrales, hypothécaires et de recensements de population nous permettent de localiser la maison de Jean Abdon Fauché et de sa famille, aux n°1 et n°3 de la rue Burat actuelle. Le même document indique qu’ils possédaient aussi une autre parcelle de jardin, de l’autre côté de la rue Burat.
A cette époque, la maison des Charmettes, au n°1 de la rue Burat, n’existait pas encore5 et le bâtiment qui la précédait était très vraisemblablement la prolongation de la longère qui demeure au n°3, constituant alors un très long bâtiment. En effet, le couple Fauché avait besoin de beaucoup d’espace, puisque dix personnes sont inscrites pour leur famille dans le fichier de recensement de 1861 … et leur présence à Bourron s’est accompagnée de sept autres naissances (quatre filles et trois garçons) !
Il est quelque peu surprenant de noter l’absence de domestique au foyer Fauché, présence pourtant fréquente à l’époque dans les familles nanties. On ne peut donc qu’en déduire l’intensité qui devait caractériser les journées de Nathalie Eugénie Plicque, seule à la tête d’une progéniture forte de tant d’enfants ! Leur situation financière ne devait pourtant pas être une limitation, puisque Jean Abdon Fauché compte alors parmi les propriétaires les plus imposés du village : en 1870, il était en 24e position de la liste des 30 propriétaires les plus aisés.
Les années passent à Bourron, apportant leur lot naturel de tragédies et de jours plus heureux. Ainsi, quand arrive 1874, cinq des enfants Fauché sont morts, certains enterrés au cimetière de Bourron. D’autres enfants se marient pendant cette période, dont leur fils Emile. Il est intéressant de noter qu’un des témoins de ce mariage est le peintre Jean Bonabe de Rougé, résidant de la Grande Rue de Bourron, illustrant ainsi les relations amicales qui pouvaient exister entre les Fauché et d’autres habitants du village.
Docteur devenu poète à la fin de sa vie
En 1881 Jean et Nathalie Fauché n’ont plus que deux de leurs filles dans leur grande maison de la rue Burat … Sans doute en relation avec le calme résultant de cette diminution de l’effectif familial, et vers la fin de sa vie, Jean Abdon Fauché s’adonne à la poésie, soumettant même quelques-unes de ses œuvres à des concours. Son Ode à Boileau lui vaudra même une médaille d’argent !6
C’est le 12 mars 1884 à cinq heures du matin que Jean Abdon Fauché rend l’âme dans sa maison de Bourron et est inhumé dans notre cimetière deux jours après. Deux années plus tard, son épouse Nathalie Eugénie Plicke vend la maison de Bourron et s’installe à Charenton-le-Pont, près de son fils Emile. Elle y décède en 1894, avant d’être inhumée au cimetière de Bourron.
1 – Bulletin des Amis de Bourron-Marlotte, n°10 (1981)
2 – Bulletin des Amis de Bourron-Marlotte, n°3 (1978) et n°12 (1982)
3 – Bulletin des Amis de Bourron-Marlotte, n°10 (1981)
4 – Un article plus complet sera publié dans un des futurs Bulletins des Amis de Bourron-Marlotte.
5 – Jean Peccard (1889-1923) – Un talent artistique sapé par la grande guerre, dans Bulletin des Amis de Bourron-Marlotte, n°65 (2023)
6 – Échos de Mont-Réal : organe officiel de l’Académie et des grands concours poétiques… / Académie Mont-Réal de Toulouse, 1880